Le salon Expolangues s’est tenu à Paris les 5, 6 et 7 février, dans sa 33e édition. J’ai eu l’occasion de m’y rendre ces trois jours, d’assister à des conférences, de prendre part à des activités et, surtout, de rencontrer des acteurs du secteur des langues. Si vous n’avez pas pu faire le déplacement ou si vous ne connaissiez pas le salon, je vous invite donc à suivre cette séance de rattrapage.
Le salon Expolangues
Depuis plus de trente ans, le salon Expolangues a lieu à Paris chaque année et rassemble des personnes de tous horizons : traducteurs, enseignants, étudiants, écrivains, chefs d’entreprise… Tous sont bien évidemment unis par une thématique commune : les langues étrangères, leur apprentissage et leur utilisation dans la vie professionnelle.
J’avoue n’avoir appris l’existence du salon que l’an dernier, quelques jours après l’édition 2014. Je me suis donc promis de ne pas le rater cette année, j’ai donc réservé les trois jours entiers à la visite de l’exposition, qui a eu lieu Porte de Versailles, dans le XVe arrondissement.
Une tendance forte de 2015 : la mobilité et l’expatriation
Signe des temps, cette édition était fortement marquée par les problématiques de mobilité, avec une surreprésentation des organismes permettant aux jeunes de partir à l’étranger : écoles, séjours linguistiques, volontariat, Erasmus… Certains y verront un symptôme d’une fuite des cerveaux, d’autres une ouverture des Français au monde qui les entoure.
Pour ma part, je me suis relativement peu intéressé à cette composante du salon. En revanche, si vous êtes étudiant, intéressé par les métiers de la traduction ou motivé pour passer une année à l’étranger, je ne peux que vous recommander de vous rendre au salon l’an prochain ! La liste des exposants est bien entendu disponible sur le site officiel de l’événement.
Plus subtile, la disposition des différents acteurs était riche d’enseignements sur les grandes évolutions mondiales. Ainsi, le carré occupé par le Hanban (organisme public chinois assurant la promotion de la langue et de la culture du pays), immanquable, était immense et situé à l’entrée du pavillon, accompagné de stands plus discrets aux couleurs du Japon et de la Corée. La présence du canada était également très forte, quoique morcelée à travers le salon, tout comme les régions hispanophones (Espagne et Amérique latine) et lusophones (portugais, principalement le Brésil). Enfin, l’Allemagne possédait un large carré au milieu du pavillon et nous invitait à « changer notre regard » sur un pays souffrant d’un énorme déficit d’image.
A la découverte des langues
Tout au long des trois jours que durait le salon, il était possible d’assister à des cours de langues dispensés par divers organismes publics ou privés : arabe, russe, chinois, letton, portugais, japonais…
L’association Espéranto France, quant à elle, proposait toutes les deux heures sur son stand des cours d’espéranto, cette fameuse langue « artificielle » parlée aux quatre coins de la planète.
Ces ateliers offrent la possibilité de s’initier rapidement à plusieurs langues étrangères et, pourquoi pas, de se découvrir une vocation ! Plus personnellement, j’ai apprécié cette occasion de découvrir certaines pédagogies, comme celle de SNG France, basée sur des cartons colorés et une gestuelle très particulière. De sacrés talents de comédiens sont nécessaires !
Si vous pouvez vous rendre au salon, ne passez donc pas à côté de ces cours : ils ne durent qu’une heure, sont conçus pour les débutants et vous permettront d’apprendre quelques expressions utiles, pour saluer quelqu’un ou se présenter.
Des conférences enrichissantes
J’ai entendu quelques visiteurs (enseignants) se plaindre de la trop grande importance accordée en 2015 au thème de la mobilité, au détriment de la pédagogie. N’ayant pas d’élément de comparaison avec les années précédentes, je ne me prononcerai pas là-dessus, d’autant plus que certaines conférences valaient le détour. Je n’ai bien sûr pas pu assister à chacune d’entre elles (je n’ai pas encore acquis la faculté de me dédoubler), mais je vous livre ici un condensé de ce que j’ai pu voir et entendre.
Le Prisme des Langues (organisé par l’Asiathèque, avec Nicolas Tournadre)
Nicolas Tournadre, linguiste spécialisé dans les langues dites « tibétiques » et parlant plus de vingt langues, est venu présenter son livre, le Prisme des Langues. J’ai beaucoup apprécié cette conférence, enrichie d’anecdotes vécues sur le terrain, auprès des Tibétains, et ne manquerai pas de mettre la main sur le livre.
Lors de la séance de questions/réponses, une visiteuse a demandé à l’invité quels étaient ses conseils pour apprendre les langues étrangères. Ils valent vraiment le coup d’être partagés, je vous les livre donc : faire feu de tout bois (multiplier les supports d’apprentissage, parler, lire, voyager…), ne pas avoir peur de faire des fautes, car l’approximation mène à l’amélioration, lire même on si on a peur de ne pas tout comprendre et, enfin, pratiquer quotidiennement par petites sessions. Les lecteurs assidus du blog ne manqueront pas de reconnaître des conseils maintes fois évoqués ici !
Des tablettes pour apprendre les langues ? (avec Vincent Olivier du Web pédagogique)
Voilà un sujet qui a visiblement intrigué le public, puisque la salle était pleine à craquer ! L’invité, fondateur de la plate-forme de cours en ligne le Web pédagogique, s’est livré à un retour d’expérience sur la tablette comme outil d’enseignement. Loin des discours formatés des vendeurs d’appareils, Vincent Olivier a jeté un regard lucide sur l’apport de cette nouvelle technologie, mais aussi sur ses limites : sans activité attrayante, la tablette seule ne suscitera pas d’intérêt pour la matière étudiée. Parmi les lectures sur le sujet recommandées par l’intervenant, Apprendre avec le numérique (Amadieu, Tricot) et Apprendre à résister (Olivier Houdé) m’ont semblé très intéressants.
Nuls en langues ? Plus jamais (organisé par Speedlingua, avec Greta Franclet)
Cette dernière conférence du deuxième jour m’a passionné pour deux raisons. Tout d’abord parce que Greta Franclet, enseignante en langues, est venue présenter son livre, Nul en langues plus jamais. Son but ? Pourfendre le mythe du Français nul en langues et rendre l’apprentissage plus facile. Encore une fois, en consultant la présentation de la méthode de l’auteur, « ESPOIR », vous constaterez que je ne peux qu’abonder dans son sens ! Encore un livre à me procurer, mon banquier appréciera…
Ensuite, ce fut au tour de Cécile Pires de Speedlingua de prendre la parole et de présenter la méthode utilisée par son entreprise, qui n’a pas manqué de m’intriguer. Il s’agit, grâce à un système de casque-micro, d’entraîner l’oreille du pratiquant en lui faisant répéter des phrases. Sa voix est alors enregistrée, modifiée par l’ordinateur et restituée à la bonne fréquence.
Ce procédé rejoint les travaux d’Alfred Tomatis, ORL français ayant mis en évidence le lien entre ce que l’oreille entend et les sons que la voix est capable de restituer. C’est une problématique fondamentale de l’étude des langues, à laquelle je consacrerai prochainement un article. Pour résumer, si votre oreille n’est pas exercée à entendre certaines fréquences, vous ne percevrez pas les subtilités d’une langue et serez donc incapables de les restituer à l’oral. C’est d’ailleurs pour cette raison que je déconseillerais de commencer certaines langues, comme le mandarin, sans l’aide d’un professeur : vous risqueriez de prendre de mauvaises habitudes sans même vous en rendre compte !
Le niveau d’anglais en France aujourd’hui (Education First)
Je ne m’étendrai pas sur cette conférence, très instructuve au demeurant, car elle reprenait les résultats d’une étude dont je vous avais déjà parlé, l’indice de compétence en anglais. Vous trouverez ladite étude sur le site d’Education First. Sans surprise, notre pays figure parmi les bons derniers d’Europe en ce qui concerne la maîtrise de l’anglais. Mais pas de panique, on est là pour arranger ça !
Stands et animations de qualité
Je ne décrirai bien évidemment pas chaque stand digne d’intérêt. Il y en avait beaucoup et l’article finirait par devenir indigeste. J’évoquerai simplement les cours d’anglais survoltés de John Stratten, la plate-forme Expat Blog (mise à jour 01/16 : désormais Expat.com), qui rassemble les personnes installées à l’étranger ; ou encore Linguascope, outil créé à Londres par des Français et bien implanté dans les écoles britanniques, qui s’apprête à débarquer chez nous. J’ai également découvert les activités que la chaîne Al Jazeera avait mises en place sur son site pour faciliter l’apprentissage de la langue arabe. Elles ne s’adressent pas aux grands débutants, mais pour peu que vous maîtrisiez l’alphabet, vous aurez accès à une plate-forme très bien pensée.
Expolangues 2015, le verdict
On pourra peut-être reprocher à Expolangues son aspect légèrement mercantile. Comme dans tout salon gratuit, nombre d’animations ou de conférences servent, in fine, à faire la promotion de produits ou services. Les fanatiques des langues étrangères n’y trouveront sans doute pas la profondeur d’un Polyglot Gathering ; ni le même prix, toutefois.
Ces quelques réserves mises à part, le salon Expolangues s’impose comme le lieu de rencontre idéal pour ceux qui font vivre les langues étrangères en France aujourd’hui. Encore une fois, si vous êtes lycéen ou étudiant, je ne peux que vous recommander d’y faire un tour, l’offre en formations, écoles et séjours y est pléthorique.
Voilà pour ce compte-rendu, vivement 2016 pour la prochaine édition !
Un article complet que je vais relire avec soin
Merci !