Bienvenue dans le premier article invité du Monde des Langues ! Aujourd’hui, Aurélien nous fait découvrir Ludi Vojago, son projet d’ateliers de création de jeux à travers l’Europe. Je vous en avais déjà parlé en mai, depuis, j’ai contacté Aurélien pour lui proposer de présenter son projet sur le site. Il a accepté, je lui laisse donc la plume le temps d’un article.
Ludi Vojago – créer des jeux de société en Europe
Je m’appelle Aurélien et j’ai toujours aimé les jeux. Les pratiquer, bien sûr – comme beaucoup de monde, n’est-ce pas ? Nous jouons tous, certes à différentes périodes de notre vie et sous différentes formes, mais la pratique ludique fait partie intégrante de nos sociétés.
Pour ma part, j’aime tellement les jeux que j’ai décidé d’en faire mon métier : le Game Design, ou conception de jeux. Trois ans d’études et quelques projets de jeux plus tard, en parallèle de mon métier pratiqué à Besançon, une question me travaillait : « mais, puisque tout le monde aime jouer, si ça se trouve, tout le monde peut se passionner pour la création, non ? ».
Alors j’ai voulu permettre un plus grand accès à la création. Pour cela, quoi de mieux que le jeu de société, qui a le grand avantage de nécessiter moins de matériel que son pendant numérique ?
C’est ainsi qu’est né le projet Ludi Vojago. Ces mots issus de l’esperanto signifient « Jeu Voyage », les deux composantes de l’initiative. L’esperanto a pour vocation d’améliorer la communication entre les peuples, et je pense que cette philosophie peut s’appliquer au jeu, excellent créateur de liens sociaux.
Un voyage de création
Mais revenons sur la composante « voyage ». Nous connaissons somme toute assez mal les différences des pratiques ludiques – jeu et création – entre les différentes cultures. Coup de chance, le voyage est également mon autre passion majeure ! Ludi Vojago est donc un voyage, dans lequel je parcourrai l’Europe pendant six mois pour proposer des ateliers de conception de jeux de société dans diverses structures locales.
L’organisation d’un tel périple est un défi certain. Financièrement tout d’abord : je réduirai au maximum les frais de transport et d’hébergement, via l’auto-stop et la communauté du site Couchsurfing, mais la vie six mois durant nécessite généralement quelques fonds. Heureusement, je suis soutenu par plusieurs partenaires (éditeurs de jeux de société, région Franche-Comté, fournisseur de matériel de jeux) et ai réussi une campagne de financement participatif via le site Ulule.
Ensuite, la volonté de travailler avec des structures locales implique un contact en amont. La première étape était de définir un trajet. Puis vint le moment fatidique de contact de structures inconnues : c’est particulièrement difficile quand l’on ne connaît rien de sa destination. Par exemple, quels sont les équivalents des MJC ? Des médiathèques ? Certains pays ont des structures locales très spécifiques. Ma recherche s’est donc axée autour de réseaux d’amis successifs, ainsi qu’en passant par les forums de sites internet : Couchsurfing, Boardgamesgeek, Trictrac.
Rendre la création accessible
La mise en place d’ateliers répondant aux objectifs du projet a également demandé de la réflexion. Quelle est ma cible ? Comment ouvrir la création à des néophytes ? Comment faire venir des participants ?
Les ateliers peuvent être adaptés à la cible, qui est fonction de la structure avec laquelle je travaille – qui communique d’ailleurs idéalement sur ma venue pour ramener des participants. Pour faciliter leur mise en place, j’ai conçu un système de cartes de conception recensant la plupart des composantes de création de jeux de société. Cet outil permet de développer la créativité en imposant des contraintes précises. Une première partie d’atelier est consacrée au jeu, afin que les participants découvrent plusieurs références de jeux. Enfin, je fournis du matériel de conception spécifique (dés, jetons, sabliers…), et la structure me fournit de la papeterie simple : papier, crayons, règles…
Quand au dernier écueil, et non des moindres : il ne s’agit ni plus ni moins que de la thématique du blog, les langues étrangères !
Comment communiquer ?
En passant dans une dizaine de pays européens, il est évident que le problème se posera un moment ou un autre. Je suis francophone et anglophone, et je possède quelques notions scolaires d’allemand, à peu près suffisantes pour trouver le bouton « contact » sur un site Internet. Le début du voyage semble donc assez bien engagé : pas de problème en France ou en Belgique, un système-débrouille assez satisfaisant pour l’Allemagne et l’Autriche.
Et après ? J’ai tenté d’apprendre l’italien, mais n’ai pas trouvé suffisamment de temps pour le maîtriser suffisamment pour animer un atelier. Quant au slovène, au croate, au serbe, au bosniaque et au bulgare, je n’ai aucune connaissance et n’ai pas envisagé de les apprendre en détail, le gap me semblant trop complexe à combler en si peu de temps…
Je pense alors utiliser un mélange de techniques de compréhensions, à adapter en fonction des événements sur place. Les voici :
- Apprendre quelques notions les jours précédents : je pense que quelques mots peuvent ouvrir beaucoup de possibilités. Par exemple : bonjour, merci, santé (« cheers »), auto-stop, français, je voudrais aller vers… Je pense que parler au moins quelques mots d’une langue déclenche souvent une vraie sympathie chez l’interlocuteur, car montrant un intérêt pour la culture locale – ce qui est un des objectifs du projet ;
- Préparer des « phrases type » sur des feuilles plastifiées : cette technique était utilisée par Ludovic Hubler, fondateur du site Travel With a Mission (permettant à des voyageurs souhaitant partager savoirs ou compétences avec des structures locales – jetez-y donc un œil !), pendant son tour du monde en stop. Un papier présentant le projet, ses objectifs, les destinations envisagées… dans la langue locale, ce qui permet de tisser des liens avec des conducteurs potentiels ;
- Travailler avec les structures locales pour demander un coup de main d’un interprète ! Un bénévole anglophone capable de traduire certains enjeux spécifiques des ateliers par exemple ;
- Communiquer par le jeu ! Pour créer du lien, le jeu de société est un bon outil (à condition de ne pas être sujet à la barrière de la langue), ce qui tombe plutôt bien au vu de la thématique du projet.
Mon voyage est toutefois prévu dans le cadre de grandes villes, souvent des capitales, et je pense pouvoir rentrer en contact avec des communautés anglophones. L’avenir seul me le dira : mon trajet a en partie été conçu pour découvrir des parties de l’Europe que je ne connais pas, je n’ai donc pas d’informations sur la pratique de l’anglais ou du français sur une large portion du trajet !
Prêt à prendre la route !
Mais après tout, la découverte n’est-elle pas l’un des plus beaux moteurs du voyage ? C’est ce que je me dis lorsque je suis pris d’appréhensions. Six mois sur la route avec mon seul sac à dos, c’est un challenge que beaucoup de voyageurs ont déjà vécu… mais je n’ai encore jamais dépassé trois semaines de voyage dans ces conditions.
Réponse à mon retour ! De plus, à l’issue du voyage, un e-book retracera les différentes étapes et mes conclusions sur les différences de pratique ludique entre les différents pays traversés : stay tuned !
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