Si l’on en croit Laurent Michel, l’amour est le seul qui importe dans un couple. Mais qu’en est-il des couples bilingues ? Comment se faire comprendre quand on n’a pas la même langue maternelle ? Quel impact a l’usage d’une langue d’emprunt sur nos relations de couple ? Comment mieux communiquer avec son ou sa partenaire pour éviter les disputes et les incompréhensions ? Je vous propose de voir tout ceci au travers de mon expérience dans le domaine.
Note : cet article vous est proposé par Sandrine du site Plaisir d’apprendre l’italien. Il aborde un sujet rarement traité dans ces colonnes, qui est pourtant au cœur de la communication interculturelle : celui du couple bilingue.
L’amour à l’international : mon vécu et les quatre leçons que j’en tire
L’amour est imprévisible. Bien souvent, il prend par surprise et sans savoir vraiment comment, on se retrouve un beau jour à dire « je t’aime » à cette personne.
« Je t’aime », « I love you » ou « Ti amo »… J’ai personnellement expérimenté les trois.
Je suis une femme française de 31 ans, qui dans son passé a eu deux relations avec des hommes de nationalités différentes de la mienne. L’un d’eux était Italien et l’autre était Belge flamand. Lorsque j’ai rencontré chacun de ces hommes, l’anglais a été la langue qui nous a permis de communiquer. En effet, ni mon Italien ni mon Belge flamand ne parlaient le français.
Au cours de ces expériences, j’ai retenu quatre leçons, que je souhaite partager avec vous sur l’impact d’une langue étrangère dans les relations de couple.
Les mots peuvent être vos plus grands amis comme vos plus grands ennemis
Si le niveau de langue des deux partenaires est inégal, il est possible que des incompréhensions se produisent. Pour ma part, dans ces deux relations mon anglais était un peu plus faible que celui de mes partenaires. Il m’arrivait donc de mal comprendre certaines tournures de phrases. Cela avait souvent pour résultat que je m’agace, m’énerve ou me ferme. Voyant cette situation se répéter, nous avions décidé d’une sorte de code dans chacune de mes relations.
Avec mon Italien, dès qu’il voyait que je m’énervais, il laissait passer la tempête puis me disait avec calme : « Est-ce que j’ai dit quelque chose de mal ? » Avec mon Belge flamand, il s’alarmait immédiatement et venait directement vers moi pour comprendre ce qui n’allait pas. Dans les deux cas, je reformulais ce que j’avais compris. Bien souvent, ce n’est pas ce qu’il voulait dire.
Par ailleurs, les mots dans une langue étrangère n’ont pas la même force. Avec mon Italien, je voulais lui dire « je t’aime » et lui « ti amo » car c’est ce qui faisait le plus sens pour nous-mêmes. Cependant, ce que nous avions convenu était de dire « je t’aime » dans la langue de celui qui entend la phrase. Après tout cette dernière est un cadeau que l’on fait à l’autre 🙂. L’effet produit était immédiat car cela avait plus d’impact pour chacun d’entendre « je t’aime » dans sa langue maternelle.
Vous apprendrez à communiquer en pleine conscience
Comme les mots sont importants dans la transmission des messages, nous avions pris l’habitude de communiquer en pleine conscience. C’est-à-dire que parler n’était pas un moyen de combler un silence ou d’exprimer sa frustration. Parler était une action que nous faisons pour créer un vrai lien. Lorsque nous avions passé une sale journée et étions amers ou en colère, il arrivait que chacun parle dans sa langue maternelle. C’était alors le signe qu’il ne fallait pas déranger 🙂…
Mon italien se mettait donc à parler dans sa langue maternelle au téléphone et mon Belge flamand en néerlandais. Pour ma part, le français venait naturellement également. Aussi lorsque nous parlions ensemble, l’anglais était la langue commune pour tisser du lien et non détruire la relation. Si nous voulions nous expliquer sur un problème, nous prenions le temps « d’évacuer » les sentiments négatifs pour être présents et parler ensemble en anglais.
Vos capacités d’écoute active et de connaissance du non verbal s’amélioreront grandement
Lorsque l’un ressentait le besoin de parler d’une mauvaise journée dans sa langue maternelle, l’autre écoutait simplement. Le fait d’être attentif aux signaux non verbaux de son partenaire nous permettait d’exprimer l’empathie avec un timing parfait. En effet, ne pas tout comprendre n’a aucune importance dans ce contexte car quand nous avons eu une sale journée, ce que nous souhaitons c’est un regard aimant, une oreille attentive et un « je te comprends mon chéri/ma chérie » dans notre langue. Comme je ne comprenais pas toujours tout, j’observais son attitude. Je savais s’il était triste, anxieux, en colère… J’ai ainsi beaucoup appris sur le langage non verbal corporel et le ton d’une voix pour comprendre le contexte d’un discours.
D’après PodcastScience (qui se base sur les écrits du psychologue Albert Mehrabian de l’Université de Californie), 93 % de notre communication est non verbale.
En fait la communication est représentée par :
- 7 % de verbal (par l’emploi des mots) ;
- 38 % de vocal (ton de la voix) ;
- 55 % de visuel (expression du visage et langage corporel).
Mon expérience m’a donc permis d’être plus attentive aux signaux non verbaux et me permet encore aujourd’hui de mieux comprendre les contextes et les enjeux d’une situation grâce au non verbal.
La patience est votre meilleure alliée
La dynamique de mes deux relations a réellement été parfaite lorsque des deux côtés la patience était exprimée sous deux formes :
- La patience pour laisser à l’autre le temps de comprendre : lorsqu’on utilise une langue qui n’est pas la nôtre on réfléchit deux fois. Si l’un des partenaires ne laisse pas le temps à l’autre de comprendre, la relation est sérieusement mise en danger.
- La patience pour laisser à l’autre son espace culturel : Un Français, un Belge et un Italien ont chacun leurs propres codes et cultures. Être dans la compréhension et la patience nous a permis de vivre en bonne intelligence ces relations.
La patience mène au respect, à la compréhension et à l’acceptation de l’autre comme individu. Il n’y a donc rien de plus beau et de plus favorable à l’amour.
Couple bilingue : cinq astuces pour bien communiquer
Au travers de mes deux expériences j’aimerais partager avec vous les cinq astuces qui m’ont permis de vivre mon couple bilingue de façon sereine.
Parler beaucoup et vraiment ensemble
Ne pas avoir la même langue maternelle est un piège que l’on peut facilement contourner en étant dans la communication constante. Oui un couple bilingue doit beaucoup parler, sans doute plus qu’un couple de la même nationalité. Cependant, l’un des grands avantages est que dès lors qu’on communique beaucoup, il existe moins d’incompréhensions. Parler permet de faire du lien et d’aller vers une relation plus forte ensemble lorsque l’on est dans l’acceptation, le respect de l’autre et le sentiment.
Soyez compréhensif
Avoir deux cultures différentes apporte un challenge supplémentaire dans le couple. Cependant si chacun est compréhensif et s’adapte à l’autre alors la relation a toutes les chances d’être heureuse. Si vous sentez qu’une tension se crée, dites-vous d’abord qu’il s’agit peut-être d’une erreur de compréhension ou d’une habitude culturelle. Avec mes deux relations, j’ai parfois eu du mal à comprendre la place de la femme dans le couple. Au final, échanger sur le sujet a permis aux deux parties de mieux comprendre cette situation et de faire des compromis pour que chacun se sente respecté.
Riez souvent
Si une erreur survient dans l’utilisation de la langue d’emprunt, riez-en ensemble. Cela ne fera que renforcer votre relation 🙂. J’ai souvent ri pendant mes deux relations de petites erreurs et d’incompréhensions de langues. Ce que je trouve fabuleux, c’est que cela dédramatise l’erreur et lui donne un aspect joyeux. Les mots sont importants, mais ne pas se prendre au sérieux l’est tout autant.
Soyez patient et attentif
La patience et l’attention que l’on porte à son partenaire viennent très naturellement car nous ne comprenons pas toujours sa langue ni sa culture. Aussi, les deux partenaires se placent instinctivement dans une position propice à l’amour. Si un couple bilingue est un challenge à première vue, c’est une formidable leçon d’humanité, d’humilité et d’écoute de l’autre.
Soyez curieux de sa culture et de sa langue
Curieuse de nature, j’ai constaté que dès lors que je me montrais avide de comprendre la langue et la culture de mon partenaire, nos relations en étaient d’autant améliorées. Plus encore, lui aussi souhaitait en apprendre sur la France et le français. Cela crée une belle dynamique dans laquelle chacun apprend un peu chaque jour de l’autre. Le sentiment d’acceptation qui est alors produit renforce encore plus les liens entre les deux partenaires. Fier de son pays et de sa langue, chacun se sent accepté et aimé comme il est.
Quelle langue choisir dans le couple ?
Lorsque l’on rencontre son partenaire, le choix de la langue se fait très naturellement. En général, c’est celle dans laquelle les deux partenaires sont le plus à l’aise.
L’anglais est souvent la langue d’emprunt pour pouvoir se comprendre. Cependant au bout d’un certain temps, les couples peuvent décider de mixer les langues. La décision est donc à prendre au sein de chaque couple. Il n’y a pas de règles prédéfinies car ce qui compte est que chacun puisse comprendre l’autre.
Pour ma part, j’ai toujours utilisé l’anglais dans mes communications courantes avec mes partenaires. Le français, l’italien ou le néerlandais étaient réservés pour apprendre à connaître l’autre ou à donner plus de poids à des mots comme « je t’aime » par exemple.
Une dernière astuce pour les couples bilingues : ne corrigez jamais votre partenaire en public sur une faute de langue. Cela mettra votre partenaire mal à l’aise et vous fera passer pour le/la méchant/e. Parlez-lui-en en privé. Il ou elle appréciera votre délicatesse.
Et vous ? Quelle est votre expérience du couple bilingue ? Avez-vous rencontré des difficultés de compréhension ? Mettez en commentaire de cet article vos doutes et questionnements sur le sujet. Je me ferai une joie de vous répondre.