Par Pierre

30 octobre 2014

choix des langues

L’apprentissage d’une langue est un travail de longue haleine, qui prend souvent plusieurs années avant d’atteindre un niveau satisfaisant. Dans ces conditions, il est évident que le fait de choisir une langue plutôt qu’une autre est particulièrement délicat, avec des conséquences sur le long terme. Si vous hésitez encore dans votre choix, cet article vous aidera à y voir plus clair.

Apprendre une langue, pour quoi faire ?

Dans un précédent article, j’évoquais plusieurs bonnes raisons de vous (re)mettre à l’étude des langues, pour profiter des bénéfices qui en découlaient. Je terminais l’article en vous invitant à trouver vos propres raisons d’apprendre, véritables facteurs de motivation qui vous accompagneront pendant des années.
Voici donc la question que vous devez vous poser au moment de faire le choix fatidique : quel est, pour vous, l’intérêt d’apprendre une langue plutôt qu’une autre ?

Apprendre plusieurs langues à la fois, un pari risqué ?

Avant toute chose, j’aimerais vous mettre en garde contre la tentation de commencer l’étude simultanée de plusieurs langues. Certes, une personne polyglotte, par définition, entretient plusieurs langues à la fois ; mais c’est parce qu’elle a pris le temps de développer chacune de ses langues séparément, jusqu’à un niveau assez élevé, avant d’en commencer une autre. C’est pour cette raison qu’en France, on commence sa LV1 en 6e, puis sa LV2 en 4e, sa LV3 en 2nde.
Si votre cocktail russe/arabe/japonais peut être séduisant sur le papier, il a peu de chances de fonctionner en réalité. Vous concentrer sur une langue à la fois comporte plusieurs avantages : tout d’abord, vous éviterez des confusions inutiles, surtout avec des idiomes proches, comme l’espagnol et l’italien. Ensuite, vous aurez l’occasion de mieux vous imprégner de la langue choisie, de la travailler plus souvent, d’apprendre du vocabulaire plus régulièrement. Vos progrès seront donc plus rapides, avec un impact positif sur votre motivation.

Cet apprentissage en parallèle reste toutefois possible, à condition d’avoir de l’expérience et des méthodes de travail bien rodées. Pour ma part, je vous recommanderai toujours de ne commencer qu’une langue à la fois.

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Vous n’êtes pas un droïde de protocole, il n’y a donc rien de mal à avoir des objectifs réalistes.

Je ne parle que le français et je ne sais pas par où commencer

Si vous êtes monoglotte, donc francophone en ce qui nous concerne, il est préférable de se concentrer sur une valeur sûre, à savoir une langue germanique ou latine.

L’anglais, un choix évident

Plus tôt dans le mois, je concédais à l’anglais le titre de langue la plus utile pour un francophone. Je ne reviendrai pas sur les immenses avantages conférés par la maîtrise de cette langue : si vous ne la parlez pas, foncez !
En revanche, j’aimerais nuancer un peu ce propos. Bien que l’anglais soit relativement facile à apprendre, ce n’est pas la première langue idéale. La grammaire manque de constance, avec finalement peu de règles et beaucoup de cas particuliers, la prononciation peut être d’une difficulté délirante si l’on n’est pas extrêmement rigoureux… Le tout est évidemment contrebalancé par la relative omniprésence de l’anglais, qui permet de s’en imprégner et de le pratiquer régulièrement.

Autres candidats

Si pour une raison ou une autre vous ne souhaitez pas commencer par l’anglais, je vous recommanderais plutôt l’allemand, l’espagnol ou l’italien.
L’allemand est une langue germanique à la prononciation beaucoup plus simple que l’anglais : si certains sont restent dur à produire pour un débutant (par exemple : schlesisch), on s’y fait vite et on prend de bonnes habitudes qui serviront pour l’anglais, comme le h aspiré ou l’accent tonique (on accentue une syllabe d’un mot). De plus, une partie du vocabulaire et des structures sont transférables vers l’anglais (« jardin » se dit garden en anglais et Garten en allemand). La grammaire est complexe, on ne va pas se le cacher, mais beaucoup plus logique que celle de l’anglais.
Sinon, l’italien ou l’espagnol sont de bons candidats : relativement faciles à prononcer (l’espagnol étant un peu plus délicat), avec une grammaire complexe mais proche du français, idem pour le vocabulaire, bien qu’il faille se méfier de certains faux amis.

Dans l’absolu, la première langue à apprendre sera fortement influencée par l’endroit où vous vivez. Si vous êtes Québecois, l’anglais est presque une évidence, si vous êtes Suisse, l’allemand est un atout de taille, etc. A vous de trancher !

Une langue de plus

Si vous maîtrisez déjà plusieurs langues, le choix devient alors plus complexe. Voici une liste non exhaustive des éléments à prendre en compte au moment de jeter votre dévolu sur un langage.

Motivation culturelle

Je le répète, une langue n’est pas un élément figé, mais évolue au contraire dans un environnement culturel riche. Si j’entends de plus en plus souvent la phrase « j’ai appris l’anglais en regardant des séries en VO », ce n’est pas pour rien : les Etats-Unis sont le pays de la série télé, il y a donc un intérêt culturel fort à apprendre l’anglais.
De la même manière, si vous vous passionnez pour les mangas ou les anime, votre apprentissage du japonais sera beaucoup plus motivant, car il vous permettra de profiter de tout cela en VO.

En d’autres termes, chaque langue s’intègre dans une culture (même l’espéranto !), si cette culture ne vous intéresse pas suffisamment, vous n’aurez sans doute pas la motivation de travailler dessus des années durant.
Ecoutez également votre instinct par rapport à la « beauté » que vous percevez dans une langue. S’il n’y a, objectivement, pas de langue belle ou laide, un alphabet, une prononciation ou une certaine musicalité pourront vous orienter dans votre choix.

Motivation « stratégique »

Si je suis évidemment opposé à la mentalité « cette langue est très utile / ne sert à rien », le fait est que certaines langues vous ouvriront plus de portes que d’autres. Par exemple, pour voyager en Europe, l’anglais vous sera plus utile que le letton.
De la même manière, certaines langues seront favorisées dans certains secteurs d’activité. Aux dernières nouvelles, l’industrie du tourisme aurait un besoin accru de russophones, vous mettre au russe ne serait donc pas forcément une mauvaise idée.

Concernant le nombre de locuteurs d’une langue, je suis assez partagé. D’un côté, c’est un facteur important car plus vous aurez d’occasions de pratiquer une langue, mieux vous l’apprendrez, de l’autre, ce n’est pas parce qu’une langue a plusieurs centaines de millions de locuteurs que vous discuterez avec chacun d’entre eux ! Avec Internet ou si votre ville est très cosmopolite, vous pourrez tout aussi bien rencontrer de nombreux locuteurs d’une langue minoritaire.

Partir dans le pays

A mon sens un passage obligé dans votre apprentissage. Partir dans un pays, à la rencontre de ses habitants agit à la fois comme une récompense (ces fichues listes de vocabulaires ont servi à quelque chose) et marquent un nouveau pallier dans l’étude de la langue.
Demandez-vous tout de même s’il vous sera facile de vous rendre dans ce pays, au moins à moyen terme. Sinon, vous courez le risque de vous démotiver profondément et d’abandonner la langue, faute de contact avec des locuteurs.
Si cela ne doit pas vous décourager d’apprendre une langue minoritaire parlée dans une région isolée et difficilement accessible, gardez cet avertissement en tête.

La question de la difficulté

Croyez-moi, ce facteur aura très peu d’impact si les autres critères de motivation sont remplis. Si par exemple le japonais vous passionne, vous apprendrez sans sourciller des centaines de kanji.
Gardez toutefois à l’esprit que certaines langues sont (beaucoup) moins accessibles que d’autres et que, si ce facteur vous effraie, rien ne vous empêche d’attaquer en premier des langues relativement proches du français (romanes voire germaniques) avant de passer à des défis plus conséquents.

Conclusion : un choix profondément personnel

En fin de compte, posez-vous la question suivante : « la maîtrise de cette langue est-elle un élément qui manque à la personne que je suis aujourd’hui ? ». Si vos motivations pour apprendre une langue sont profondément subjectives et personnelles, alors vous trouverez le courage de travailler chaque semaine pendant des années jusqu’à la parler couramment.
Après tout, certaines des personnes qui y arrivent le mieux ne sont-elles pas celles qui le font pour pouvoir communiquer avec un conjoint étranger ? Apprendre une langue est un engagement sur le long terme, mieux vaut donc l’entreprendre pour de bonnes raisons.

Crédit photo : Alja.

Pierre

Fondateur du Monde des Langues, j'aide les passionnés de langues à devenir plus autonomes et à atteindre leurs objectifs. J'ai eu l'occasion d'apprendre l'allemand, l'anglais, le finnois, l'italien et le japonais.

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  1. Excellent article.
    Je suis d’accord qu’il vaut mieux ne pas commencer plusieurs langues en même temps, mais je trouve sympa d’en commencer une nouvelle quand on a atteint un niveau assez avancé dans la précédente. Ça permet de retrouver la jubilation des débuts, mais aussi de se rassurer quand ça commence à se corser avec l’autre. Par exemple, je suis avec le japonais dans une phase où, les fondamentaux étant globalement acquis, je dois beaucoup lire pour emmagasiner du vocabulaire et retenir ces foutus kanjis et, bien que ce soit une phase très intéressante, les progrès sont beaucoup plus lents qu’au début, et c’est parfois un peu décourageant.
    En commençant l’italien cette année, j’ai retrouvé l’excitation que procurent la découverte d’une nouvelle langue/culture et les progrès rapides et, étrangement, ça m’a aussi aidé à retrouver le courage de me plonger dans mon japonais. J’imagine qu’il est préférable que ces deux langues soient assez différentes, pour éviter les confusions (comme le souligne l’article), et peut-être aussi parce que le côté faussement redondant peut être démotivant.

    En tous cas, très bon article (et très bon site même, que je viens de découvrir). Merci !

    1. Merci, tes compliments me vont droit au cœur !
      En effet, se mettre à une nouvelle langue permet de retrouver sa motivation par rapport à l’apprentissage en général. Maintenant, je pense qu’il vaut mieux se concentrer sur une langue à la fois et attendre d’avoir atteint un « seuil critique » avant d’attaquer la suivante. Sinon, on risque de s’éparpiller et de travailler pour rien. Après, la difficulté reste d’entretenir toutes ses langues simultanément : pas évident, mais faisable !

  2. Bonjour
    J’ai bien aimé l’article, car je me suis confronté à un problème, j’ai espagnol à l’école mais la langue qui m’intéresse vraiment est le portugais.je me débrouille en espagnol j’ai un niv b1 mais je ne me sens pas connecté à la culture espagnole, je me sens plus connecté à la culture brésilienne

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